Jeudi 23 juin 2022 :
Trois jours après un vote sanction qui l’a privé de majorité absolue à l’Assemblée Nationale et avant de partir pour une longue séquence internationale, Emmanuel Macron a pris la parole hier soir dans une courte allocution télévisée.
Allait-il prendre la mesure de la situation et faire preuve de contrition ou d’humilité ? certainement pas ! Macron a fait du Macron, allant jusqu’à nier la vérité sortie des urnes…
En effet, dans sa quête d’une porte de sortie pour gouverner, le président de la République a rejeté toute idée de gouvernement d’union nationale – n’est pas le général de Gaulle qui veut – et souhaité « trouver une majorité plus large et plus claire pour agir ».
Le chef de l’État n’a pas trouvé la recette miracle mais fait preuve d’un culot qui frise l’inconscience. Sûr de son fait, il reste encore convaincu de pouvoir ramener 44 députés à lui… sur la base de sa politique et de ses réformes.
Or, il se trompe à double titre :
D’une part, s’il détient bien un mandat du peuple et une légitimité du fait de sa reélection, les Francais n’ont pas choisi son projet en avril dernier, comme il l’affirme. A tout le moins, ils n’ont pas ratifié ce choix dans les urnes le week-end dernier.
D’autre part, aucune force politique, à gauche comme à droite, n’a intérêt à donner un blanc-seing à la majorité présidentielle, au moment même où celle-ci est affaiblie.
Alors, ne nous leurrons pas, cet appel au compromis et à la « responsabilité » est un artifice dont on peine à discerner ce qui relève de l’ultimatum ou de la main tendue.
Car, en renvoyant la patate chaude aux groupes d’opposition de l’Assemblée et en réclamant une clarification de leur position, il inverse le paradigme tout en leur remettant la pression.
Non seulement il cherche à se défausser en les rendant comptables des futurs échecs à gouverner mais il prévient ceux qui voudraient jouer la politique du pire… en creux, les responsables de la crise institutionnelle sont déjà connus ou comment dessiner la possibilité de dissoudre dans quelque temps.
Dans cette partie d’échecs qui s’engage, le joueur de l’Elysée a choisi la stratégie du « pourrissement » qui n’a qu’un seul but : gagner du temps et prendre les Français à témoins d’une situation de blocage.
Or, si déplacer la responsabilité vers l’Assemblée lui permet de pousser ses avantages jusqu’aux ultimes limites, il apparaît aussi comme un déni de realité et donne à penser aux Français qu’il n’a pas compris leur message…
On a connu chemins moins tortueux pour « bâtir des compromis » !