Mercredi 8 mars 2023 :
Après la parenthèse des vacances d’hiver, les syndicats espéraient durcir le ton en cette 6ème journée de mobilisation contre la réforme des retraites.
Sans forcément constituer un tournant, avec 1,28 million de manifestants, c’est une nouvelle démonstration de force puisque le record du 31 janvier a été battu (lire billet UPF, 1/2).
Les syndicats avaient annoncé vouloir mettre la France à l’arrêt et inscrire le mouvement dans la durée.
Un pays bloqué ? si la proportion de grévistes est restée moins importante que le 19 janvier à la SNCF et dans l’Education nationale (lire billet UPF, 20/1), force est en tout cas de constater que le pays était bien au ralenti dans les raffineries, ports et autres ronds-points investis.
Cette paralysie devrait se poursuivre sans toutefois conduire à un risque de pénurie pour l’instant.
Combien de temps la grève et les blocages peuvent-ils durer ? dans un premier temps au moins jusqu’à samedi sans nul doute puisqu’une nouvelle journée d’action nationale est prévue.
Après la journée d’hier qualifiée “d’historique”, l’intersyndicale joue maintenant son va-tout et le fait d’écrire un courrier à Emmanuel Macron pour demander un rendez-vous d’urgence en est bien une preuve évidente.
Il faut dire que le gouvernement joue la montre en comptant sur l’adoption de la réforme par le Sénat d’ici à dimanche grâce à la droite sénatoriale et qu’un vote solennel à l’Assemblée intervienne le 16 mars, à moins qu’un recours à l’article 49-3 ne vienne compliquer la donne.
C’est d’ailleurs l’une des facettes de la stratégie des syndicats : contraindre l’exécutif à ce passage en force délégitimant la réforme.
Mais le jeu de dupes ne va pas durer éternellement.
Le jusqu’au boutisme a ses limites dans chaque camp. Du côté des syndicats la réalité institutionnelle risque de les rattraper, au vu du calendrier précité, tandis que c’est la réalité sociale qui pourrait bien, à plus ou moins long terme, jouer des tours aux macronistes, pompiers pyromanes inconscients du degré d’inflammabilité du pays.
A défaut de partir en vacances ensemble, il serait vraiment temps que les France irréconciliables recommencent à se parler.
Car, au delà de la guerre d’usure qu’il escompte remporter – mais qui sera tout sauf une victoire tant le divorce est consommé avec l’opinion (lire billet UPF, 1/2) – l’exécutif ferait bien de se poser la question des conditions d’un dialogue sur les sujets essentiels de la reconstruction des missions de l’Etat et la réparation des vraies inégalités.
Alors que tant de choix et de décisions viennent déjà éprouver notre cohésion sociale, nous n’avons plus le temps de se payer le luxe de nous affronter.